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vendredi 25 janvier 2019

Communiquer pour mieux se synchroniser




En ce début d’année 2019, des chercheurs de l’université de Kyoto ont montré comment les œufs de punaise diabolique (Halyomorpha halys) synchronisent leur éclosion


          En plein froid hivernal, il est facile d’imaginer le confort de l’intérieur d’un œuf. Recroquevillé(e) dans un environnement douillet, il fait chaud, la nourriture est à portée de main. Mais tôt ou tard, il faudra sortir et affronter le monde extérieur. Oiseaux, tortues, grenouilles, insectes, tous devront faire face après éclosion, à de nombreux dangers. L’approche d’un prédateur, des pluies diluviennes… autant de menaces qu’il est important de pouvoir détecter de l’intérieur.
          Sortir de son œuf au bon moment peut être une question de survie. À l’approche d’un serpent, les vibrations générées par son déplacement vont être un signal d’alarme pour les embryons de la rainette aux yeux rouges. Ils sont capables de discriminer le rythme et la fréquence des vibrations d’un serpent, de celles engendrées par des gouttes d’une pluie calme. De manière synchronisée, ils vont alors sortir de leur coquille pour échapper à leur prédateur.
          Le signal d’éclosion peut être d’origines variées. Chez les crocodiles, il prend la forme de vocalises prénatales. Elles indiquent à la mère qu’il faut ouvrir le nid, et à la fratrie qu’il est temps de sortir de l’œuf. D’autres types d’éclosions synchronisées permettent par exemple un départ collectif de la fratrie chez certaines espèces migratrices. 

          Des chercheurs de l’université de Kyoto ont montré que chez Halyomorpha halys, un insecte également connu sous le nom de punaise diabolique, les vibrations émises par le craquellement de la coquille stimulent l’éclosion synchronisée de la fratrie. Les scientifiques ont alors pu identifier et reproduire leurs fréquences, pour stimuler de manière artificielle l’éclosion des œufs de punaise. Une fois générées, les vibrations vont être transmises d’un œuf à l’autre par contact de coquille à coquille. En absence de contacts, ou une fois les œufs isolés, les éclosions au sein d’une même fratrie seront asynchrones.
          Après éclosion, les nymphes de Halyomorpha halys vont se nourrir des œufs restant. Cet acte de cannibalisme constitue une menace pour les embryons. Ainsi, comme l’approche d’un serpent pour les embryons de rainettes aux yeux rouges, les vibrations émises par les premiers craquellements de coquille d’œuf de punaise diabolique seraient le signal de l’arrivée imminent de prédateurs : leurs congénères.

          Au terme communication, nous associons les notions de « parler », « entendre », « lire », « écrire »… Il existe cependant une multitude d’autres signaux pouvant être perçus et interprétés. C’est ce que l’étude du monde animal nous révèle. Il y a bien sûre la perception des phéromones, signaux chimiques servant à marquer un territoire, indiquer une présence… Les ultrasons, utiliser par les chiens, les chauves-souris ou encore les dauphins pour se repérer dans le monde extérieur, ou encore l’émission et perception de vibrations, comme le montre cette nouvelle étude de janvier 2019. Elle nous rappelle notamment qu’ils existent tout un champ sensoriel dans la communication animale que nous avons tendance à oublier en tant qu’humain. 



M.A
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Article paru dans JS2, Janvier 2019

REFERENCES : 
Crocodile egg sounds signal hatching time. Vergne, A.L., and Mathevon, N. Curr. Biol. (2008) 18, R513–R514. 

How embryos escape from danger: The mechanism of rapid, plastic hatching in red- eyed treefrogs. Cohen et al. (2016). J. Exp. Biol. 219, 1875–1883. 

Egg-Cracking Vibration as a Cue for Stink Bug Siblings to Synchronize Hatching. Endo et al. Curr. Biol. (2019) Jan 7;29(1):143-148.e2. 

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